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Diapason # 632 (02/2015)
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Code-barres / Barcode : 0825646343546 (ID493)

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Analyste: Sophie Roughol

Pressentie par quelques airs distillés dans le récital Steffani de Cecilia Bartoli (« Mission », Diapason d'or), la splendeur de Niobe n’avait pas encore été révélée en intégralité au disque L ‘opéra créé à Munich en 1688 sortait de l'oubli en 2013 au Early Music Festival de Boston, et sa captation soignée (en studio) rend justice à une merveille, jalon essentiel du chemin qui mène de l'opéra vénitien triomphant des années 1640‑1660 (Monteverdi, Cavalli) au seria.
Inspiré par les Métamorphoses d'Ovide, le livret d'Orlandi narre la chute de Niobe. Fille de Tantale et épouse d'Amphion, roi de Thèbes, elle affirme par orgueil être l'égale des dieux et trahit son époux avec le prétendant Clearte. La vengeance sera terrible, les dieux tueront ses enfants, Amphion ‑ nouvel Orphée qui élève des murs par son chant ‑ se suicidera, Niobe se changera en pierre. De l'opéra vénitien, Niobe garde le rythme virevoltant, le mélange des genres entre tragique, surnaturel et comique (l’inévitable nourrice Nerea), l’intrigue parallèle (le couple Manto/Tiberino) et un magicien, Poliferno. Mais Steffarli oeuvre en visionnaire: il amorce l'aria da capo, nimbe les voix d’une riche instrumentation souvent cuivrée (subtilement assumée par Paul Odette et Stephen Stubbs), articule danses, récit et chant au sein d'une forme toujours changeante. Les souvenirs de son séjour parisien auprès de Lully répondent à des surprises harmoniques, son imagination mélodique propulse bien des airs au panthéon
(« Amami » à l'acte III).

Si Niobe est l’argurnent, Anfione est l'alpha et l'oméga musical qui offre un rôle sur mesure à Philippe Jaroussky. Le contre‑ténor est au zénith, rendu à un état de grâce inné et maîtrisé qui renforce a contrario la sophistication des mêmes airs ciselés par Bartoli. Aussi ferme que suave dans l’exultation amoureuse (« E di sasso chi non t'ama »), la méditation métaphysique (« Sfere amiche », saisissante musique des sphères en compagnie de violes, un des sommets de la partition), la prière (« Come padre e come dio ») ou la fureur hallucinée (« Tra bellici canni »), Jaroussky nous subjugue. A ses côtés et dans une distribution ne montrant aucune faiblesse, Karina Gauvin en grande voix manie le fer et le miel de l'arrogante Niobe, Amanda Forsythe ourle charnellement les délicatesses de Manto. Si on ajoute à ces compliments un orchestre affûté et un continuo qui répond au doigt et à l'oeil, on tient avec cette Niobe le premier opéra incontournable de l'année 2015.
 

 

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