Texte paru dans: / Appeared in:
*


Diapason # 659 (07/2017)
Pour s'abonner / Subscription information


Harmonia Mundi
HMM90228687




Code-barres / Barcode : 3149020228623(ID603)

Appréciation d'ensemble:

Outil de traduction (Très approximatif)
Translator tool (Very approximate)
 

Analyste: Denis Morrier


Déployant un extraordinaire arsenal d’armes de séduction, Raphaël Pichon nous livre un objet unique et fascinant, prodigue en émotions riches... et parfois paradoxales. Sertis dans un véritable livre, richement illustré et agrémenté d’articles substantiels, le programme savamment ordonné évoqué la naissance de l’opéra à la cour des Médicis. Quatre trames narratives se succèdent, sur le modèle des intermèdes florentins de la Renaissance: L’Empire d’Amour, la Fable d’Apollon, Les Larmes d’Orphée et un Balet des Amants royaux. Ces épisodes distincts, mêlant choeurs, sinfonie, madrigaux et monodies accompagnées sont de véritables pasticci, empruntant vers et musiques à différentes oeuvres.

L’essentiel provient des célèbres Intermèdes de la Pellegrina (conçus en 1589 pour les noces de Ferdinand de Médicis et Christine de Lorraine), assortis d’autres spectacles de cour: les intermezzi de 1568 (I Fabii), deux comédies de 1585 (Stravaganza d’Amore) et de 1600 (Il rapimento di Cefalo). Pour expliciter le lien qui unit ces formes théâtrales hybrides (entre actes déclamés et intermèdes chantés) aux premières tragédies entièrement mises en musiques, plusieurs extraits d’opéras fondateurs sont insérés : fragments de l’Euridice créée en 1600 pour les noces de Marie de Médicis et Henri IV sur des musiques de Peri et de Caccini, et de la Dafné conçue par Marco Da Gagliano en 1608 pour la cour de Mantoue.

Ce mélange d'intermèdes (par nature somptueux et décoratifs) et d'extraits de mélodrames (à caractère tragique) pourrait sembler didactique et bricolé. Mais les points de couture se font oublier dans le flot bien rythmé d’une création esthétique et théâtrale originale. Disons même que Pichon restitue aux intermezzi une cohérence dramatique que les exécutions modernes (de la musique seule) négligeaient jusqu’ici. Et si la chatoyante chimère pose sur les humbles favole in musica un habit somptueux, sans rapport avec les effectifs réduits des créations, c'est en les rapprochant de l’Orfeo montéverdien, certes unique en son temps. Que de splendeurs, à redécouvrir! Notre jeune chef a réunit un plateau de rêve: sept voix solistes parmi les plus prometteuses de la jeune génération (avec Lucile Richardot, Maïlys de Villoutrey, Sophie Junker et Zachary Wilder, pour ne citer qu'eux), un choeur aussi solide qu’attentif de vingt‑quatre chanteurs, en regard de vingt‑cinq instrumentistes éblouissants. L’orchestration des intermèdes et la distribution des polyphonies renouvellent sans cesse les tableaux sonores.

Les pages admirables se succèdent, entre architectures polychorales et recitar cantando, merveilleusement chantées et fastueusement accompa-gnées. L’épisode orphique est un sommet: la « scène de la Messagère » (portée par la voix poignante de Luciana Mancini) et le « tombeau d'Euridice » de Peri nous sont enfin révélés dans toute leur puissance dramatique, reléguant aux oubliettes les versions Ephrikian et De Caro. Et les « pleurs d’Orphée » de Caccini, magnifiés par Renato Mancini, surpassent en intensité pathétique les réalisations de Nicolas Achten ou de Rinaldo Alessandrini.

Alors surgit le seul regret : que Raphaël Pichon n’ait pas osé proposer une tragédie d’Euridice intégrale, mêlant, comme à sa création, les musiques de Peri et de Caccini. Faisant cela, c’est dans un univers théâtral encore inexploré qu'il nous ferait pénétrer. Mais le monde sonore qu'il nous révèle ici a déjà de quoi nous éblouir et nous bouleverser!            
 


Sélectionnez votre pays et votre devise en accédant au site de
Presto Classical
(Bouton en haut à droite)

Pour acheter l'album
ou le télécharger


To purchase the CD
or to download it

Choose your country and curency
when reaching
Presto Classical
(Upper right corner of the page)

   

Cliquez l'un ou l'autre bouton pour découvrir bien d'autres critiques de CD
 Click either button for many other reviews