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Diapason # 632 (02/2015)
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Coro
COR16121




Code-barres / Barcode : 0828021612121

Appréciation d'ensemble:

Outil de traduction ~ (Très approximatif)
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Analyste: Ivan A. Alexandre

 

Mozart a fait Idomeneo, Gluck Iphigénie, Handel Jephtha. Italien, français ou anglais, le héros sacrifiera‑t‑il son enfant au dieu qui le gouverne ? Deux routes se présentent généralement à l'interprète : passion ou compassion. Révolte contre les décrets homicides ou tendresse pour les âmes déchirées. Dilemme qu'illustre l'antagonisme de deux chefs au moment d'enregistrer Jephtha la même année 1979 ‑ le pessimiste vengeur Nikolaus Harnoncourt contre l'optimiste compassionnel Neville Marriner.

 

Comme Marriner et ses héritiers Gar­diner, Creed ou McGegan, Harry Christophers choisit la compassion. Mais cette fois, la lumière résiste à la froideur. Le chef et son (petit) orchestre embrassent le destin des bourreaux et des victimes. Dès le premier acte, ils y croient. Le Juge d'Israël n'est qu'amour d'autrui et soupçon de lui‑même ; la mère, Clytemnestre biblique, a plus d'affec­tion que de rage; la fille plus de santé que de fragilité (mère et fille semblent deux soeurs, la confusion guette) ; l'amoureux Hamor plus d'angélisme que l'angélus ex machina. Tout ce joli monde signe la paix avant le conflit, mais leur sagesse n'est pas une fuite. Les mots vivent, les phrases respirent, les caractères se dessinent.

 

Reprocherons‑nous à Susan Bickley l'usure prématurée d'un timbre hier voisin d'une Sarah Walker ? A Robin Blaze la pâleur d'un falsetto éthéré ? A James Gilchrist un ténor sans métal dans un emploi de quasi‑baryton ? Ce serait injustice. Car tous font assaut de courage pour narrer leur histoire ‑ à la troisième personne, mais avec éloquence et constance. Gilchrist, en particulier, franchit les obstacles pour incarner le plus sensible des Jephtha. Ses récitatifs sont à enseigner dans les écoles; les doubles-croches de « His mighty arm » fusent et parlent à la fois, « Open thy marble » remplace la terreur par une stupeur absolument juste, et « Waft her, angels » en voix mixte nous tient au bord des larmes sans une once de sentimentalité. Quel musicien ! Solide Zebul (son air de l'acte II, « Freedom now », emprunté à Agrippina et ajouté à l'oratorio en 1753, est joint en appendice). Et Last but not least, choeur splendide, dans la fresque comme dans le contrepoint. Si l'orchestre ne joue que son rôle de soutien, du moins soutient‑il infailliblement. Parmi les Jephtha consolateurs, voici donc du neuf et du meilleur, moins par les performances individuelles que par l'harmonie de l'ensemble.
 

 

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