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Diapason # 642 (01/2016)
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Hyperion
CDA68068



Code-barres / Barcode : 0034571280684

Appréciation d'ensemble:

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Analyste: Gaëtan Naulleau

Aux temps héroïques du renouveau baroque, on ne badinait pas avec le rythme. Leonhardt Consort, English Concert ou Collegium Aureum, mêmes principes: le langage nouveau s'élaborait sur une hiérarchie nette des appuis dans la mesure. La grille des temps forts, faibles, demi‑forts... superposée à celles des articulations, des accents et des harmonies, divisait et tendait la phrase. C'était parfois caricatural, parfois d'une vigueur folle. Une Monica Huggett ne s'essayait pas au violon baroque par pure passion pour Bach ou Corelli, mais parce qu'elle retrouvait dans cette approche le jaillissement rythmique qui la transportait dans le rock.

 

A Iggy Pop, les jeunes d’Arcangelo préfèrent les Bisounours. D'élève en élève d'élève, le principe s'est affiné chez certains, assoupli chez d'autres, complexifié parfois, et totalement liquéfié dans les cinq concertos au programme d'un album à la fois brillant (par les tempos, par l'agilité sans limite de la soliste) et confus. Le petit orchestre londonien ne manque pas d'énergie, mais de la colonne vertébrale qui pourrait l'articuler.

 

Il n'essaie d'ailleurs même pas, et dissimule son indétermination derrière une élégance floue, dont Bach n'a jamais profité ‑ decrescendos coquets où l'on s'y attend le moins, attaques amorties en soufflés, noeuds rose bonbon de théorbe, treize à la douzaine, et quelques effets gore pour faire bonne figure. Ne pas confondre souplesse et mollesse, danse baroque et tutu lascif, swing et mal de mer (le premier volet du Sol mineur!).

 

L’ingénieur du son place Alina Ibragimova tout devant et relègue au loin l'orchestre flou ‑ comme au bon vieux temps, quand les interprètes se souciaient peu du dialogue tramé dans l'écriture de ces concertos. La distance profite aux innombrables flottements de l'orchestre et décalages avec la soliste, mais surexpose un partenariat schizophrène. Les phrasés, les caractères, les pianississimos  (surjoués dans l'Adagio du mi majeur), les ornementations, les sautes d'humeurs (parfois touchantes) d'Alina Ibragimova n'ont qu'un rapport lointain avec l'esthétique de ses compagnons de jeu. Eux‑mêmes se soucient peu d'affiner les plans sonores d'un échange, d'organiser des moments de prise de parole et de    retrait. Chacun est quitte. Restent les moyens phénoménaux d'Ibragimova, qui ne semble pas désarçonnée un instant par le marathon virtuose du mineur reconstruit... mais qui aurait pu s'attarder un peu sur le BVW 1055 en la majeur, beaucoup moins exigeant, et comme déchiffré.

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