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Diapason # 619 (12/2013)
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Erato
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Code-barres / Barcode : 5099931914727 (ID380)

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Appréciation d'ensemble:

Analyste:  Gaëtan Naulleau
 

Philippe Jaroussky possède-t-il vraiment la tessiture attendue dans le Stabat Mater, son registre grave a t-il assez de densité, de rondeur pour les pages pathétiques de cette Pietà à la fois austère, galante et lyrique ? Le contre-ténor, plutôt mezzo que contralto, ne force pas le trait. Il aborde la partition en musicien subtil, avec la complicité d’un chef qui se garde bien de dramatiser l’expression à l’encontre de solistes juvéniles. Diego Fasolis nous épargne les effets à deux sous systématisés par certains de ses collègues italiens. Son orchestre onctueux nous rappelle celui d’Hogwood : noblesse et caractère, phrasés contrastés mais toujours vocaux par essence. Hogwood était d’ailleurs l’un des premiers (Decca, 1988) à confier le Stabat Mater à deux voix candides, à l’image de ces peintures où des angelots aux yeux embués et aux fesses dodues soulèvent la couronne d’épines. Bowman et Kirkby ouvraient la voie à Bonney et Scholl (Rousset, Decca), plus récemment Rial et Mena ( Pierlot, Mirare), désormais Lezhneva et Jaroussky. Pourquoi pas ? Les fameuses chaînes de dissonances du premier duo portent en elle autant de suavité que de désolation, l’entrain galant du Quae moerebat (étrange musique pour nous dire « Cette mère se lamentait, se désolait et tremblait à la vue des souffrances de son fils ») et les béatitudes du Quando corpus morietur vont comme un gant à ce type de voix. Mais à condition de sculpter les mots, que Lezhneva laisse flotter sous un legato de rêve. Parfois elle en fait ressortir un, s’efforce d’articuler... et aussitôt se relâche. Jamais l’élan de son chant ne vient de la déclamation. Moyens superlatifs, certes, mais peu de chanteuses ont abordé l’oeuvre avec une expression aussi vague - quelques touches de vibrato serré pianissimo ne donnent pas le change dans un Vidit suum placide. Emma Kirkby - qui n’a certes pas le dolorisme viscéral d’une Dorothea Röschmann, avec Biondi - se montrait infiniment plus touchante. Et avant tout : plus présente.

Les deux psaumes pour solistes, choeurs et orchestre joués en complément étaient déjà gravés par Abbado dans sa trilogie Pergolèse (DG, 2008). Une grâce distanciée unifiait ces deux partitions inégales et festives. Fasolis leur apporte plus de vie, d’étoffe... d’intérêt. Page de jeunesse, le Confitebor tibi reste assez convenu, mais c’est dans la joie désinvolte du premier air que Lezhneva montre enfin de quel charme elle est capable. Le vaste Laudate Pueri Dominum domine l’album, et offre à Jaroussky deux solos taillés sur mesure. Lezhneva se déboutonne dans plusieurs pages brillantes. Toujours garder espoir.
 

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