Texte paru dans: / Appeared in: |
|
|
Outil de traduction |
|
|
Analyste: Frédéric Degroote Pour son deuxième album, le duo Dulces Exuviae capture l'essence et l'expérience de la nuit, du crépuscule à l'aube. Toutes les facettes de son immensité y sont représentées : solitude, passage du temps, érotisme, clarté de la lune… À cette fin, les deux interprètes convoquent un large éventail de compositeurs (français, italiens et espagnols) et de genres du XVIe siècle, de la frottole aux madrigaux, des chansons aux villancicos, augmentés de fantaisies pour luth. Mais ce qui pourrait paraître un vain projet, trop terne ou trop éparpillé, trouve son unité dans un remarquable et pur équilibre entre la voix de Romain Bockler et le luth savant de Bor Zuljan. Intimité naturelle, poésie séduisent de bout en bout dans cette suite de tableaux nocturnes. Le caractère réduit du duo ne nuit nullement à la richesse du contrepoint d'un Lassus ou d'un Crecquillon (comparez leurs versions de la chanson éponyme de l'album, au même texte savoureux !) ; il sied particulièrement aux genres plus légers, comme la frottole (Tu dormi, io veglio). Et les diminutions du baryton (La nuyct froide et sombre) comme du luthiste sont dosées avec science et sensibilité. Le chant sans faille de Romain Bockler illustre avec une force tranquille les madrigalismes inspirés par un tel sujet aux musiciens de l'époque (motifs descendants vers le grave, notes longues, etc.), tandis que Bor Zuljan recourt à deux instruments, dont un avec cordes en métal, ajoutant une couleur idoine à cet éloge nocturne et aux pages pour luth du compositeur Jean-Paul Paladin (mort avant 1565). Ce superbe programme, remarquablement argumenté dans la notice, nous invite à nous mettre dans la tête des hommes du Cinquecento qui scrutaient la lune ou les étoiles pour y trouver un sens à leur destinée (Ay luna que reluces).
|
|
