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Analyste:
Roger-Claude Travers Si les récitals consacrés aux dive et divi de l’opéra baroque comme Cuzzoni, Fabri ou Strada, ne manquent pas, focaliser un programme sur le Sant’Angelo, scène emblématique du théâtre lyrique vénitien, est une première. Rien d’étonnant à cela pourtant. Ce fut le fief de Vivaldi, qui y régna comme compositeur et imprésario, compensant des moyens restreints par une créativité musicale audacieuse dont ne pouvait se targuer le San Giovanni Grisostomo, théâtre officiel de la noblesse. S’immerger dans les airs de Vivaldi, Ristori ou Chelleri illustrant l’âge d’or de l’opéra vénitien, entre 1710 et 1720, est un délice. Par souci de cohérence, Le Consort aurait pu aussi choisir des pages de Heinichen ou Porta de même période, plutôt qu’un énième « Siam navi » vivaldien tardif, évoquant les passions tumultueuses. Mais le suc des airs choisis ne réside pas dans la virtuosité hypertrophiée. Place à la lamentation, au remords, aux reproches, au lent !
Dans son cœur de tessiture, Adèle Charvet, tour à tour poignante et subtile, excelle à la mélancolie. Son timbre d'un grain profond n'est que nuance et caresse. Savourez la simplicité ambiguë d'« Il mio crudele amor », la plainte déchirante d'« Aspri rimorsi » avec ses descentes onctueuses dans le grave, le « Con favella de pianti » juste susurré, avec son petit côté air du froid du King Arthur de Purcell et surtout le remarquable « Tu m'offendi » exprimant l'amour fraternel. A la tendresse un peu affectée d'un Jarousski répond une émotion sincère, moins fragile et plus touchante.
La trame orchestrale tisse ici une soie délicate, sans les outrances d'un Spinosi. Le Consort a une grâce dans le geste et une finesse de jeu. Ah ! cette beauté du violon de Théotime Langlois de Swarte dans « Sovvente il sole », évoquant le soleil qui se lève. Dans la réjouissante « Quella bianca e tenerina », danse paysanne endiablée avec flûte à bec et percussions, Charvet s'amuse en colorant un peu son bas registre. Elle ravit aussi dans ce petit bijou décalé qu'est l' aria da batello « Patrona reverita », mini-scène de reproche d'un employé à sa bêcheuse patronne. Elle y distille à la fois le suave et le pervers.
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