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Diapason # 604 (07-08/2012)
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Mirare
MIR150




Code-barres / Barcode:
3760127221500 (V32)
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Appréciation d'ensemble:
Analyste: Gaëtan Naulleau
 

Corelli boit à la source d’Hippocrène, s’enthousiasme sous l’effet de ses eaux puis s’assoupit, se retrouve au Parnasse accueilli par les muses et les honore d’une fugue savante : pourtant ces tableaux subtils nous ennuient ferme - argument critique volatile, mais sentiment tenace. On ouvre la partition pour fixer les oreilles qui glissent à la surface d’une réalisation superlative : impossible de ne pas admirer les équilibres, les tours de main du continuo, la finesse de trait des violons (condition sine qua non dans une écriture en trio si ouvragée), les détails élégants qui ne dérangent pas le cours harmonieux de la phrase (pas même les Saillies). Il faut un sacré métier pour afficher tant d’aisance dans une oeuvre qui ne fait pas de cadeau. Mais rien n’y fait, la leçon de style ne nous parle toujours pas.

Serions-nous trop marqués par l’enregistrement de Jordi Savall ? On le ressort, et tout s’éclaire. Ce n’est pas la force de l’habitude qui nous voile la proposition de Philippe Pierlot et de violonistes de premier plan (François Fernandez et Sophie Gent), c’est la force de caractère qui leur manque. Savall, Huggett et Banchini (quelle idée, ce face à face !) attaquent l’Apothéose de Corelli, et tout de suite on entend le désir implorant du prince des violonistes qui « prie les muses de le recevoir parmi elles », on le voit à travers les notes filées, les cambrures du phrasé, les surenchères des archets au fil des progressions harmoniques ; toutes choses que font également Pierlot, Fernandez et Gent, mais toujours à demi. Leur Sommeil étire une superbe soierie quand Savall nous hypnotise, à un tempo plus rapide, par son balancement. Leur majestueuse Descente d’Apollon (« qui vient offrir son violon à Lulli ») reste curieusement égale et statique. La Plainte - confiée à deux flûtes - est un joyau délicat. Mais là encore, la qualité expressive et sensuelle des timbres avait une tout autre force d’évocation sous les sourdines de Banchini, Huggett et Savall.

De Savall, Pierlot n’aura retenu qu’une mauvaise idée : les titres des mouvements dits à voix haute. La candeur émerveillée de François Morel pose le même problème qu’hier les interventions de Bernard Hervé : elles désamorcent le contraste des caractères enchaînés (la demi-cadence à la fin de Corelli au pied du Parnasse tombe à plat) et surtout morcellent une oeuvre qui, au contraire, a besoin d’élan, d’unité. Irait-on titrer ainsi les épisodes du Carnaval de Schumann?

 

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