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Diapason # 600 (03/2012)
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Ricercar
 RIC322



Code-barres / Barcode: 5400439003224 (ID206)

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Appréciation d'ensemble:
Analyste: Denis Morier       

Musique in loco : Paolo Da Col a tenu à enregistrer la Missa In Illo Tempore dans la basilique de Sanra Barbara, au coeur du palais ducal de Mantoue là où Monteverdi oeuvrait et vivait en 1610.
II publiait alors un recueil bicéphale avec d’une part les célèbres Vêpres et de l’autre la messe, monument tardif à la gloire du contrepoint renaissant bâti sur dix motifs mélodiques empruntés à un motet de Gombert ; Monteverdi (qui évoquera sa Missa di gran fatica !) les soumet à un traitement digne d’une série dodécaphonique alla Schönberg (chaque motif peut être rétrogradé, renversé ou les deux à la fois) pour engendrer une série continue de fugues et d’imitations canoniques d’une complexité aussi éblouissante qu’admirablement sonnante. Ce chef-d’oeuvre, régulièrement enregistré (Corboz, Schneidt, Christopher, Suzuki...) semblait avoir trouvé son interprétation de référence dans la lecture aérienne et diaphane de Philipp Herreweghe (HM) C’est peu dire qu’Odhecaton bouleverse la donne. Ses partis pris découlent notamment du lieu: Paolo Da Col dispose ses chanteurs dans les deux tribunes de la basilique destinées aux chantres, face à face, et fait accompagner la messe par le somptueux orgue Antegnati de 1565 monté sur une troisième tribune (quand Herreweghe privilégiait le a cappella au sens habituel du terme). Ajoutez à cela qu’il adopte une transposition générale vers le grave conformément à la notation en chiavette, recourt exclusivement à des voix masculines (donc à des falsettistes) et étoffe le continuo avec harpe et luth, viole et contrebasse... Le résultat sonore est stupéfiant, à la fois plus charnel et plus brillant. La messe acquiert une profondeur, une ampleur, une splendeur sonore insoupçonnées, le contrepoint serré à six voix trouvant dans cette spatialisation une nouvelle lisibilité - ce sont, par exemple, les deux parties de superius qui se répondent face à face en canon au lieu de se fondre dans une image homogène. Les voix masculines sont équilibrées et délicatement timbrées, d’une chaleur poignante, imprimant une réelle religiosité à l’ensemble. Enfin, la prononciation a été particulièrement soignée, de telle sorte que le texte demeure intelligible malgré les complexes entrelacs du contrepoint. Ce programme admirablement pensé confronte à la messe en stile antico des motets peu connus de Monteverdi en stile moderno (en particulier deux Salve coeli et un lumineux Regina coeli avec voix de femmes) et ceux de son prédécesseur à Mantoue, Giaches de Wert. Diversité et cohérence nourrissent l’une des réalisations montéverdiennes les plus abouties qu’il nous a été donné d’entendre.
         

 

 

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