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Analyste: David Fiala Texte intégral: Les mélomanes parisiens ont pu découvrir ce programme l’hiver dernier (2010), dans une grande nef du couvent des Bernardins pleine comme un œuf. Le disque gravé dans la foulée du concert tient toutes ses promesses, autour de l’extraordinaire Messe Puer natus est à sept voix de Tallis, probablement composée pendant la période de répit que connut le culte catholique en Angleterre sous le bref règne de Marie Tudor (1553-1558). Seules trois des cinq sections habituelles de l’ordinaire ont été conservées (si le Kyrie était rarement mis en musique en Angleterre, le Credo a manifestement été perdu). Mais même dans cet état lacunaire, l’œuvre s’impose comme la messe cyclique la plus élaborée jamais composée outre-manche, non seulement par son inspiration, ses amples proportions et son effectif, mais aussi par son accumulation de procédés savants la durée de chaque note du cantus firmus, chanté au ténor sur l’introït Puer natus est, est fixée par un système de correspondance avec les voyelles (a= 1 temps, e= 2 temps, i= 3, etc) ! Pour tenter d’expliquer à la fois cette ampleur et cette complexité hors normes (même pour l’auteur du fameux Spem in alium à quarante voix), certains musicologues l’associent à la grandiose cérémonie de réception du roi d’Espagne Philippe II dans la cathédrale Saint-Paul de Londres en décembre 1554, tandis que d’autres y voient une sorte de composition de fin d’études supérieures (mais alors très supérieures). Les deux hypothèses soulignent combien cette messe de Noël mêle luxuriance sonore et ingéniosité intellectuelle. Stile Antico, nouveau fleuron du chant anglais a cappella (cf. portrait – Diapason no 584, p. 14), permet de goûter pleinement ce fascinant alliage. Outre ses qualités de précision et d’homogénéité, qui laissent chaque ligne scintiller au sein des contrepoints les plus denses, saluons un art de varier les ambiances et de redessiner les amples vagues qui animent la musique. Le reste du programme joue de la variété des styles très contrastés de Taverner (Audivi vocem pour voix haut perchées), White (Magnificat expansif et virtuose), Sheppard (radieux Verbum caro) et Byrd (quatre motets d’une exquise concision). Tout en exaltant la liberté et les audaces qui caractérisent la foisonnante musique de l’époque Tudor, le fil conducteur de l’Avent et de Noël maintient une forte unité esthétique, autour de l’expression du mystère par la musique, saisissante dès le Videte miraculum de Tallis qui ouvre l’album. Dans le dédale discographique de ce répertoire favori des groupes anglais, un seul conseil : Audite miraculum, écoutez ce miracle-là. |
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