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Goldberg Magazine # 12 (09/2000)
Goldberg a cessé de publier avec le # 54
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Goldberg is no longer available. # 54 was the last issue.

 
 

On distingue presque toujours trois étapes dans la production des grands maîtres : celle de la jeunesse, où l'on constate l'influence de leurs modèles ; celle de la maturité, où brille leur génie dans toute sa splendeur ; puis une troisième et dernière étape où l'artiste tend à l'introspection. Le grand Josquin ne fait pas exception à la règle.

La Missa Pange lingua est la dernière composition connue du maître français, qui ne vit pas l'édition de l'oeuvre, car elle fut publiée à Nuremberg en 1539 avec douze autres Messes de différents auteurs. Le grand nombre de copies manuscrites prouve sa popularité, mais dans des cercles très réduits. Cette Messe est certainement l'oeuvre maîtresse du genre pendant la Renaissance, et elle est sans doute celle qui résume l'art d'un maître dont la musique est comparable, pour sa beauté sereine, à la peinture de Léonard.

La tissure en contrepoint de chaque mouvement de la Messe, dont une partie du Sanctus et de l'Agnus sont à deux voix face aux quatre voix du reste, se déroule dans une clarté diaphane, qui devient réalité grâce à la magistrale leçon d'interprétation a cappella de A Sei Voci. Sans sons stridents, sans à peine hausser la voix, à la recherche de l'équilibre parfait entre les registres vocaux, et surtout de la communication émotionnelle de la beauté, l'ensemble vocal dirigé par Bernard Fabre-Garrus réussit à se rapprocher parfaitement de la Messe de Josquin et de ses trois derniers motets sacrés, qui complètent le programme du CD. Quant au dernier, Christus mortuus est, sur l'auteur duquel on a des doutes, s'il n'est pas de Josquin, il est digne de lui.

 MARICARMEN GOMEZ