Texte paru dans: / Appeared in:
*


Diapason # 644 (03/2016)
Pour s'abonner / Subscription information


Glossa 
GCD923507



Code-barres / Barcode : 8424562235076

Appréciation d'ensemble:

Outil de traduction ~ (Très approximatif)
Translator tool (Very approximate)
 

Analyste:  Gaëtan Naulleau

 

Curieuse histoire du violon baroque. Il fallait voici quinze ans choisir son camp et afficher son parti: ou bien s’astreindre aux figures obligées du « chin‑off » et découvrir à travers cette technique une gamme d’articulations, de résonances, de nuances étrangère au violon moderne, ou bien s'autoriser des compromis pour jouer propre et brillant sur un instrument monté à l'ancienne. Les disciples de Sigiswald Kuijken ne juraient que par la « parole instrumentale » et l'ancrage terrien de la danse, les autres répondaient que Leclair et Vivaldi n'ont pas attendu Paganini pour barioler à hue et à dia et gambader dans la stratosphère. Avons‑nous remarqué que le mur s'est effrité ? Deux des techniques les plus impressionnantes du violon baroque, Amandine Beyer et Leila Schayegh, relèvent aujourd'hui du pur chin‑off. Inutile de vous présenter la première, mais retenez bien le nom de la seconde, autre disciple de Chiara Banchini à Bâle, déjà saluée par trois Diapason d'or (chez Benda, CPE Bach, et récemment Caldara en dialogue avec Beyer).

 

Voilà pour la technique, dont la légitimité historique importe en vérité moins que tout ce qu'elle permet. Schayegh nous laisse bouche bée dans un festin de couleurs et de phrasés orchestré avec le non moins virtuose Jörg Halubek. Ils disent travailler ces sonates ensemble depuis dix ans, on les croit sur parole. Ce n'est plus la barre de mesure qui les réunit mais l'élan proprement vocal des lignes ‑ alors l'oreille suit l'écriture serrée le plus facilement du monde. Dans cette polyphonie aux pôles changeants, Schayegh sait passer au second plan sans pour autant jouer « petit », reprendre le dessus sans faire écran, accorder la densité et la lumière du timbre aux registrations et aux textures du clavecin ‑ splendide modèle de Keith Hill. Grisante dans les tutti, la complémentarité des timbres prend des formes inattendues dans un Adagio le jeu de luth contraste avec l'émission assombrie du violon, et celui où Halubek suspend ses guirlandes dans l'aigu sur les doubles cordes diaphanes. Et quelle main gauche au clavecin! Dans les allegros son rebond vif a tout d'un violoncelle, dans l’Adagio ma non tanto sa stabilité libère au‑dessus un rubato divin. L'histoire continue, par ces perfectionnements mais aussi au gré des hybridations: rendez‑vous bientôt chez une « moderne » passionnée d'ancien, Isabelle Faust, qui vient de graver les six sonates avec Kristian Bezuidenhout.

 

 

Cliquez l'un ou l'autre bouton pour découvrir bien d'autres critiques de CD
 Click either button for many other reviews