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Diapason # 657 (05/2017)
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Aparté 
AP135D




Code-barres / Barcode : 3149028004816

Appréciation d'ensemble:

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Analyste: Jean‑Philippe Grosperrin

 

À l'origine de cette nouvelle intégrale, une production à Nancy qui a pu laisser mitigé (cf. no 638). L’enregistrement à la Philharmonie de Paris quelques mois plus tard flatte un orchestre moins sautillant, et le verbe de la protagoniste y gagne en netteté ‑ mais pas le choeur, trop lointain. À l'image d'un Prologue conduit d'un trait, et qui n'aura jamais paru aussi intéressant (Judith Van Wanroij et surtout Marie‑Claude Chappuis sont exceptionnelles d'acuité et d'imagination tout du long), Christophe Rousset arpente le théâtre et les danses d’Armide d'un pas soutenu, quitte à précipiter certaines séquences, brouillant l'élocution des chanteurs (« Esprits de haine », « Plus Renaud m'aimera »), ou à frustrer l'auditeur d'une respiration poétique dont la seconde version de Philippe Herreweghe (HM) est prodigue (Sommeil de Renaud, par exemple).

On est pourtant séduit par une élégance distinguée (« Suivons Armide et chantons sa victoire »), par une ornementation féconde en diminutions, par l'esprit preste et parfait d'un acte IV brillamment distribué (Cyril Auvity bénéficie aussi à la Passacaille). Mais si l'intensité dramatique est sollicitée par tout un jeu sur les silences dans le récitatif, jusqu'à en introduire d'outrés chez Armide (« je... frémis, je... soupire »), la langue est curieusement approximative (divers lapsus ou erreurs de texte, liaisons intermittentes, h aspirés ou non) et la marotte des interjections couinées ou expectorées (ah ! Ciel !) trouble autant l'onirisme du Il que le ton tragique.

Entre le charme aristocratique de Rachel Yakar (première version Herreweghe pour Erato) et les éclats fiévreux de Guillemette Laurens, Marie‑Adeline Henry se situe du second côté, mais avec une voix impressionnante de santé, de sensualité et de couleurs (jamais épaisses), de puissance comme de maîtrise dynamique, de fierté dans la caractérisation. Voilà bien une Armide ombrageuse, dangereuse, très personnelle, qui dispense des moments superbes (« Il m'aime ? quel amour! », scène avec Renaud au V) et sait amollir (monologue du II) une véhémence ailleurs surabondante : la vulnérabilité d’Armide semble alors céder aux fureurs d'une Médée, ou plutôt une tragédienne pour Gluck ou Berlioz perce sous le masque de 1686. Les allègements sont pourtant là, ainsi que des signaux rhétoriques ostentatoirement « à l'ancienne », mais ils paraissent d'autant plus artificiels qu'ils voisinent avec des écrasements sans noblesse ou des inspirations sonores alla Callas ‑ le rire sardonique face à Hidraot est heureusement la seule scorie de la régie hystérisée de Nancy.

La stature hors norme de cette protagoniste n'en rend que plus inerte un Renaud assez terne, dont le chant parfois scolaire (« Tout m'invite au re­pos », « Trop malheureuse Armide ») fait regretter l'éloquence inimitable d'un Howard Crook ou les lignes si érotiques de Julian Prégardien à Nancy. Peut‑être aussi qu'un timbre plus dense pour la Haine aurait mieux équilibré l'acte III, mais Marc MauilIon s'y montre inquiétant pour deux. Cette Armide nouvelle s'impose en tout cas comme pendant aux enregistrements de Philippe Herreweghe, pour l'ensemble, pour Marie‑Adeline Henry, pour les comparses, et pour prendre la mesure de ce que peut recéler un tel chef‑d'oeuvre.

 


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