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Diapason # 637 (07-08/2015)
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Glossa
GCD922514




Code-barres / Barcode : 8424562225145

Appréciation d'ensemble:

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Analyste: Gaëtan Naulleau

Corne d'abondance

 

Face à face pour la première fois devant les micros, deux des plus belles sonorités du violon baroque nous font perdre la tête dans huit sonates vénitiennes d'une inépuisable suavité.

  

0n peut certes imaginer plus glamour qu'un album alignant sous une pochette tristoune huit sonates baroques méconnues et d'ampleur modeste... Pourtant quel festin et quel plaisir des timbres immédiat ! Les trente‑trois plages sortent d'une corne d'abondance inépuisable, l'inspiration des interprètes ne faiblit pas un instant.

 

On ne présente plus Amandine Beyer, et si vous nous lisez fidèlement, vous savez que Leila Schayegh reçoit ici son troisième Diapason d'or après des récitals Benda puis C.P.E. Bach. La chaconne finale résume leur approche mûrie avec trois continuistes hors pair: une suavité noble domine, et la maîtrise extrêmement fine de l’articulation, des différents appuis, des décalages légers, des couleurs aux violons combinées avec la basse, nuancent les étapes sans rupture, sans un seul contraste franc (même au début des variations en mineur) jusqu’au dernier accord. Enivrant.

 

1693, AVANT‑GARDE

 

Le Vénitien Caldara avait un peu plus de vingt ans quand il livrait son premier opus en 1693. Il faut y voir l'équivalent des deux messes pour orgue de François Couperin trois ans plus tôt : une carte de visite en forme d'éventail, qui déploie tout son savoir‑faire dans un genre assez récent. La distance des siècles et la paresse nous présentent ici des sonates en trio concises et plutôt banales: l'imprégnation stylistique et le discernement des interprètes nous ouvrent les yeux sur un répertoire d'avant‑garde défendu par un jeune loup qui avait déjà fait ses preuves au théâtre. Caldara suivait, bien sûr, le nouveau chemin tracé par Corelli, dont les éditions étaient en train de conquérir l'Europe entière, mais il s'en démarquait aussi avec des tournures parfois fantasques et des développements un peu plus ambitieux. Deux minutes en moyenne, direz‑vous ? Mais Beyer et Schayegh savent bien qu’il faut à la fois scruter dans chaque mouvement le moindre détail, et prendre le recul nécessaire pour les voir s'intégrer dans une grande forme en quatre volets.

 

Là où certains interprètes, qui n'ont que trois ou quatre tours dans leur sac, appuient le trait en douche écossaise, cette inépuisable malle à outils stylistiques permet d'alléger les effets sans appauvrir l'intense variété du propos. Beyer et Schayegh ont parfaitement retenu la leçon de Chiara Banchini (dont elles ont pris la relève à la Schola Cantorum de Bâle), et Jörg‑Andreas Bötticher celle de Jesper Christensen, mais ils joignent à cet héritage une aisance virtuose sans précédent. La musique de chambre s'élève alors à un niveau digne des plus grands quatuors jouant Mozart ou Bartok. Avons‑nous souvent entendu cela dans le répertoire baroque ?


 

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