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Diapason # 619 (12/2013)
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Pan Classics
 PC10299



Code-barres / Barcode : 7619990102996

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Appréciation d'ensemble:

Analyste:  Gaëtan Naulleau

Fatalement déçus par le peu de musique que leur laisse Bach, les flûtistes « à bec» ont pris l’habitude de transcrire les Sonates en trio pour orgue, en répartissant les voix avec un clavecin. Michael Form essaie tout autre chose. Comme Bruce Haynes dans sa réjouissante suite aux Concerts brandebourgeois (cf: no 608), il pioche différentes pages pour élaborer des oeuvres inédites. Il ne reconstruit pas des originaux perdus, mais invente des partitions nouvelles de Bach à l’aide d’un bagage « historiquement informé» au plus haut point. Dans une Sonate en sol majeur par exemple, il transpose, arrange et rapièce un Largo pour violon seul (BWV 1005), la fugue d’une sonate pour violon et continuo (BWV 1021), un volet de la Pastorale pour orgue (dont Casals et les violoncellistes faisaient leur miel depuis longtemps), enfin la gigue finale du triptyque BWV 998 pour clavier. Une Suite en mineur se modèle sur le cahier pour flûte de Dieupart, que Bach appréciait — il faudra quelque temps à l’auditeur non prévenu pour identifier dans l’Ouverture volubile la Suite pour violoncelle en do mineur, absolument méconnaissable.

Pas un instant on ne distingue les coutures. On a beau connaître par coeur les originaux, on les oublie sous la matière nouvelle ajustée par Form et son complice Dirk Börner. Les pièces a priori les moins propices à un instrument mélodique — le scherzo capricieux de la Partita en la mineur, l’Allemande en mi majeur — ne coulent pas moins naturellement que Bist du bei mir, orné avec éloquence. Une abondante réverbération prive les quelques pages brillantes, dont le Presto (Cantate BWV35)  joué en conclusion, d’une partie de leur électricité. Mais elle contribue à la subtile fusion des timbres (magique dans l’air pour ténor de la Trauerode) et respecte en vérité la recherche de Michael Form, flûtiste qui ne danse pas en sautillant, comme tant de ses collègues, mais avec la souplesse d’un valseur.

Börner apporte une contribution décisive à ce jeu dangereux. Sur un clavecin idéalement « flûté» dans les aigus, son continuo caméléon, savant, jamais sec ni envahissant, toujours à l’écoute, masque les inévitables limites propres à la flûte à bec, instrument du trompe-l’oeil. Deux prestidigitateurs sont à l’oeuvre dans cette apothéose de la « flûte à Bach ». Précisons qu’outre la réussite des transcriptions, nous faire entendre une heure quatorze de flûte à bec sans nous donner des envies de meurtre, n’est pas un mince exploit. 

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