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Diapason # 641 (12/2015)
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Analyste: Gaëtan Naulleau

Un Gloria sans hautbois suspendu sur la sicilienne, pourquoi pas (Vivaldi propose un violon solo alternatif). Sans voix d'hommes ? Alléluia : les interprètes curieux de rendre à la musique sacrée composée pour La Pietà vénitienne la palette vocale dont disposait Vivaldi sont rares encore. Mais un Gloria sans solistes ? Une demi‑douzaine d'altos pèsent sur la ligne du Domine Deus, Agnus Dei, que jadis Carolyn Watkinson (joyau de la version Preston, Decca) Iançait jusqu'au ciel. Hervé Niquet s'en explique, et s'emmêle les pinceaux. Ce n'est pas ce type de solo qui était susceptible d'être entonné « en chapelle », et ce numéro moins que tout autre : le contraste entre l'oraison solitaire et la réponse chorale est désamorcé par ce renfort gras de la prière. Le Laudamus Te en duo s'en sort mieux. Sans plus d'élégance, mais avec l'ardeur franche d'une compagnie de jeannettes le soir autour du feu. « Une jeannette est toujours active. Une jeannette est toujours gaie. Une jeannette dit toujours vrai » : c'est cela. « Une jeannette est toujours propre » : transmettre aux violons SVP.

La trompette !? Disparue, sans un mot d'explication. Ni fondement historique, ni contrainte économique, puisque le mini‑orchestre se paie le luxe d'un trio de théorbes ‑ et d'un « gling‑glung‑glong » rebattu avec acharnement sur chaque croche de l'Et in terra Pax, quatre minutes durant. La contemplation n'est pas à l'ordre du jour. Oui, « Une jeannette est toujours active. »

Plus sérieusement, Hervé Niquet n'est pas à la page sur la question des voix de femmes chez Vivaldi, pourtant résumée par la notice de Michael Talbot. Comment l'effectif de La Pietà pouvait‑il s'accommoder de partitions notées à quatre voix mixtes ? « Les parties de ténors étaient écrites dans l'aigu, dans la tessiture de seconds alti, et les exécutantes chargées de la basse avaient le choix de chanter dans le registre écrit ou dans celui de contralto, à l'octave supérieure. La basse vocale étant toujours doublée aux instruments, l'harmonie ne s'en trouvait pas affectée. » Des dames té­nors ? Le diapason vénitien (la 440 Hz) leur facilitait la tâche.

Mais ce n'est pas ce que nous entendons. Niquet s'en tient au diapason baroque passe‑partout (415 Hz) et à l'hypothèse illustrée par Andrew Parrott il y a vingt‑cinq ans (Virgin), depuis battue en brèche par plusieurs travaux : basses et ténors montent d'une octave. L’image sonore est plutôt agréable et familière, conforme à l'idée moderne des voix égales, mais la polyphonie se voit régulièrement troublée par des incongruités (comme ces lignes de remplissage en dents de scie qui passent au premier plan quand la ligne de sopranos glisse sous le ténor octavié). L’autre hic, c'est que tout se ressemble ; les jeux de texture par lesquels Vivaldi nuance la couleur du tutti (par exemple en faisant descendre soprano et alto à l'approche du point d'orgue, dans le premier numéro) disparaissent avec l'octaviation du ténor, tout se fond. Richard Vendome, dans un excellent documentaire de la BBC doublé d'un Gloria intégral (sur YouTube), a pris le risque de faire descendre ces dames à la cave, et nous y entendons l'inverse: l'octaviation des basses et les ténors féminins, qui n'hésitent pas à nasaliser leur voix de poitrine donnent un relief fantastique aux tutti couronnés par les altos habituels et des sopranos légers.

Voilà pour le Gloria. Faut‑il préciser que ni le Laetatus sum, ni le Magnificat ni le Lauda Jérusalem qui suivent ne sont des perles de poésie ?

 

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