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Diapason # 650 (10/2016)
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Linn
CKD469



Code-barres / Barcode : 0691062046923(ID546)


Appréciation d'ensemble:

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Analyste: Gaëtan Naulleau

 

Pour son premier Noël à Leipzig, Bach mettait les bouchées doubles devant les fidèles de Saint‑Thomas, impressionnés par un Magnificat plus opulent, virtuose et varié que tout ce qu'ils avaient pu entendre jusque-là. John Butt, en regroupant dans un programme inédit les musiques de ces vêpres de Noël 1723, nous montre le nouveau Cantor encore plus arrogant qu'on ne l'imaginait: une cantate à peine moins imposante que le Magnificat (dans sa version longue en mi bémol) ornait le même office! La reconstitution, beaucoup plus fiable que l'interminable « Messe de l'Epiphanie » de Paul McCreesh (Archiv, 1998), inclut également une polyphonie à huit voix de Gabrieli, et l'orgue, outre ses grands préludes, s'invite dans les chorals entonnés par l'assemblée : il insère entre leurs versets ses « vocalises » extraverties, dans un réjouissant contraste avec la sobriété des hymnes luthériens.

Composée à Weimar, la BWV 63 est l'une des rares cantates au choeur final aussi ample que le premier, et la seule dans laquelle Bach empile quatre trompettes. Leur divin raffut est‑il compatible avec la théorie du choeur de solistes ? Oui, répond l'équipe d'Edinburgh, qui laisse les trompettes à plein régime mais ajoute quatre voix de ripiéno aux quatre concertistes, placés au tout premier plan. Inutile dans ces conditions de peaufiner un beau son rond, il importe avant tout de clamer chaque parole droit et clair.

La prise de son experte de Philip Hobbs a sa part dans l'efficacité de la démonstration : supérieurement aérée, elle permet de distinguer tous les timbres et de saisir le moindre coup d'archet des violons en retrait. Et dans les tutti, on entend nettement les efforts d'une mezzo‑soprano qui s'invente des graves en nasalisant ‑ les airs ne lui feront pas de cadeau. Hormis le ténor, aucun soliste n'est un baume pour l'oreille, mais c'est à peine un problème dans l'expression très directe, anti‑esthétisante, de John Butt. Renoncer au perfectionnisme microscopique moderne, cet héritage du disque, ouvre de nouvelles perspectives.

On guettait, dans le Magnificat, l'« Omnes generationes ». Le chef­musicologue allait‑il, comme son collègue Joshua Rifkin (1982, Pro Arte), et comme le voulait déjà Tovey, prolonger dans ce choeur le tempo modéré du « Quia respexit » ? Butt, ailleurs si expérimental, ne prend pas le risque de suivre la partition à la lettre, et donne le coup d'accélérateur habituel. Les deux sopranos ne déméritent pas, l'excellent ténor fait de l'ombre à la mezzo à court de notes et de ligne dans le « Quia fecit » (d'une lenteur statique). La basse s'agite beaucoup et manque d'avaler le micro dans le « Quia respexit ». Peu à peu, l'absence d'arrière‑pensée qui nous plaisait au début de l'album nous pèse.

 


   

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