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Diapason # 652 (12/2016)
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Harmonia Mundi 
HMC902247



Code-barres / Barcode : 3149020224724

Appréciation d'ensemble:

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Analyste: Gaëtan Naulleau

La détresse des bergers, la profondeur froide de La Nuit (tableau instrumental), le feu apaisant de l'Ange, enfin le départ vers la crèche: première partie de la Pastorale H 483, petit opéra dévot qu'admiraient à NoëI les princesses de Guise dans leur hôtel du Marais. Charpentier le présentait en 1684, changeait totalement la deuxième partie l'année suivante, de même en 1686. Une merveille, trois versions.

Les jeunes Arts Florissants gagnaient un de leurs premiers titres de gloire (HM, 1981) avec celle de 1685. La deuxième partie s'ouvre alors sur l'Ancien accueillant les bergers ; on se pâme devant le nouveau‑né, l’Ange revient le temps d'un air gracieux, et les derniers mots vont au mystère de Marie inviolée. Est‑ce pour le retour de l’Ange ou pour l'ensemble madrigalesque faisant souffler le chaud et le froid, que Christie faisait ce choix ? Inoubliables, en tout cas, la naïveté dansante des violes et des flûtes, et chaque mot d’Agnès MelIon, dont l'autorité tendre hisse les mots solennels («Du trône souverain qui régit l'univers, le verbe auteur de tout vient prendre ici naissance, que tout se taise en sa présence. »)

Sébastien Daucé, qui a succédé aux, Arts Florissants en résidence à Caen, et enregistre aujourd'hui pour le même éditeur, se livre‑t‑il à un exercice oedipien ? S'il se mesure au disque légendaire, c'est, en fin musicologue, avec l'atout d'un projet inédit: réunir les trois versions de la deuxième partie. Et notamment la dernière (H 483b), jamais enregistrée, où Charpentier évacue toute intrigue pour se concentrer, comme De La Tour avant lui, sur les visages des bergers frappés dans l'obscurité par la « source de lumière et de grâce ». Dans le grand choeur final, l'onction qui soude les voix et les instruments de Correspondances nous comble. Mais la version de 1684, révélée par un très beau disque de Martin Gester (Accord, 1996), demeure la plus riche musicalement et spirituellement. Comment joindre les deux pôles de la Nativité, la rédemption qu'elle promet et le sacrifice qu'elle appelle ? Bach, à la fin de l'Oratorio de Noël, les superpose : il greffe sur un orchestre jubilatoire un choral de la Passion. Le propos de Charpentier n'est pas moins limpide et brillant. Les loups rôdent, une brebis a péri, une bergère se lamente : « Hélas ne suis‑je pas mille et mille fois malheureuse »... et l'écho céleste corrige: « heureuse mille et mille fois » ! Le développement musical sera à la hauteur de l'idée. C'est, avec la merveilleuse Violaine Le Chenadec, simple et charismatique, l'instant de grâce d'un disque passionnant et impeccable.

On comprend vite que Daucé s'interdit ce qu'il entend chez les jeunes Arts Florissants comme des choix maniéristes ou discutables. Dès l'introduction, il file plus droit. Tout sonne avec plénitude, tout respire l'intelligence et le travail. D'une plage à l'autre, nous admirons cette honnêteté subtile (et en quelque sorte indiscutable) face au texte musical, servie par des personnalités toujours attentives à se fondre dans l'équipe. Mais rien à faire, chaque comparaison nous scotche aux climats de Christie, à l'élan bousculé de ses bergers prenant la fuite (que les nouveaux sont soigneux!), à leur humour «( ministre ailé du dieu de gloire, daignez encore le répéter! »). Quant au silence qui rayonne entre les phrases d’Agnès Mellon... Pure magie. Mais les Arts Florissants connaissent‑ils toujours le chemin qui conduisait naguère leur Charpentier au ciel ? Nostalgie.


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